Mines GéologieReportage
SECTEUR MINIER MAROCAIN
ET SI L’ON PASSAIT LE SECTEUR MINIER MAROCAIN EN REVUE
A chaque fois que le secteur minier marocain est invoqué, les gens pensent immédiatement aux phosphates (et aux hydrocarbures). Dans la mesure où le Maroc recèle des ressources en phosphates estimées à plusieurs millions (pour ne pas dire milliards) de tonnes, permettant ainsi au pays, d’une part, d’occuper une place de leader à l’échelle mondiale et d’autre part, constituer une industrie créatrice de richesse et d’emplois.
Ceci étant, il y a lieu de signaler que le Maroc exploite aussi d’autres substances minérales et occupe des positions honorables sur l’échiquier international. Est-ce à dire que le Maroc est un pays minier ? Personnellement, je préfère parler d’un pays à vocation minière. La nuance est un peu subtile dans la mesure où il est préférable de réserver la dénomination de pays minier à un pays où ce secteur intervient pour une grande part au niveau du PIB national, ce qui n’est pas le cas du Maroc où l’industrie minérale intervient, bon an mal an, pour 6 à 7% au niveau de notre PIB.
Si l’exploitation des phosphates remonte au siècle dernier, les mines métalliques étaient connues et exploitées au Maroc depuis la nuit des temps. Plus encore, certaines mines ont fait la richesse du pays et on même permis le développement de dynasties. C’est le cas par exemple du Todgha (Tineghir, actuellement) qui était connue pour mes minéralisations argentifères et, d’ailleurs, les vestiges des anciens travaux sont encore visibles sur le site. Il en est de même à Jbel Aouam (actuel Tighza, près de Khénifra) et dans le Tafilalet où l’on exploitait du plomb argentifère. Le sel aussi jouait un rôle important dans l’économie nationale et dans le commerce extérieur et vu que les mines de sel ne manquaient pas, le Maroc a pu glaner des richesses qui ont fait la réputation des circuits caravaniers qui commercialisaient le sel en échange avec l’or. Il faut dire qu’à l’époque, peu de mines aurifères étaient connues au Maroc. Ce que certains historiens retiendront, c’est l’impact que ces richesses avaient sur la stabilité politique du pays. En effet, détenir des mines permettait d’équiper et d’entretenir une armée et donc donnait des ambitions de conquête. De plus, le plomb, le cuivre et l’étain étaient utilisés pour la fabrication des armes et des munitions.
Nous n’avons aucune idée des méthodes d’exploration qui étaient utilisées lors de la recherche minière. Peut être l’éclat métallique était il un guide ? Mais était il seul, surtout quand on sait que des filons à teneurs « normales » étaient exploités. Il fallait donc qu’une industrie métallurgique soit développée, ce qui est d’ailleurs attesté par les scories que l’on trouve par ci et par là (Tazalaght, près de Tafraout ; Tagount, près de Rissani ;…). Des alluvions étaient aussi exploitées (cas d’Al Karit à Oulmès pour l’étain).
On voit donc que la tradition minière du Maroc n’est pas un qualificatif gratuit.
Les temps ont évolué et avec eux les technologies et les besoins de l’industrie. L’avènement de l’ère industrielle allait consacrer des méthodes d’approche dites « scientifiques » quoique basées sur l’observation et le cumul de l’expérience.
A mon avis, le développement minier de tout pays dépend de trois principaux facteurs : la géologie, la réglementation, la promotion minière.
Tous les manuels décrivent le Maroc comme étant un pays à géologie favorable. Sa position géographico-géologique et son histoire en font un pays à fort potentiel. En effet, pratiquement, tous les terrains sont présents au Maroc tant du point de vue nature pétrographique que du point de vue âge. Deux exceptions de taille doivent être signalées à ce niveau : les roches réputées diamantifères (kimberlites) et aluminifères (bauxites) n’ont jamais été décrites au Maroc. De même, les roches ultrabasiques connues dans certains massifs marocains n’ont pas permis de découvrir de gisement de platinoïdes.
Du point de vue évolution et géodynamique, le Maroc a connu une histoire très riche dans la mesure où sa partie sud renferme des terrains très anciens du bouclier ouest africain, l’Anti-Atlas, le haut atlas occidental et les mésetas ont été formées (pour une bonne partie) dans des contextes favorables à l’accumulation de sulfures métalliques. Les chaînes atlasiques, au sens large, renferment des terrains aptes à encaisser de gros gisements plombo-zincifères. C’est d’ailleurs dans ces formations qu’a été découvert Touissit-Boubeker, l’un des principaux gisements de par le monde. Dans le Nord du Maroc, la jeunesse des terrains (hormis les Beni Bousera) en fait une zone de prédilection pour la recherche tant des roches et minéraux industriels que des minéralisations associées au volcanisme récent. Dans ces zones, les minéralisations s’accumulent dans plusieurs endroits constituant des districts miniers.
(*)Ingénieur Général des Mines
ENCADRE
Des exploitations
Sans prétendre à l’exhaustivité, l’auteur dresse ci-après les principales minéralisations exploitées au Maroc :
1.Les gisements Plombo-cupro-zincifères : Ils constituent le groupe le plus important en quantité de gîtes connus. On les trouve dans pratiquement tous les contextes géodynamiques du pays. Les plus importants sont Touissit-Bédiane dans la région d’Oujda, Tighza (près de M’rirt), Hajar (près de Marrakech), Tafilalet, Bleida (près de Zagora), Aouli-Mibladen-Zaida (près de Midelt).
2.Les gisements phosphatés : quatre districts sont connus : Khouribga, Bengrir, Youssoufia et Boucra. D’autres indices sont connus ailleurs (Meskala, Chichaoua) et sont en cours de reconnaissance.
3.Les gisements stanno-wolframières : On signalera dans ce cadre les gîtes d’Oulmès, et d’Azegour (molybdène). Les travaux entrepris dans la région d’Achemache (Maroc Central) et Taourirt Tamellalt (Saghro) ont mis en évidence des occurrences en cours de développement.
4.Les gisements cobalto-nickélifères : Si des indices de nickel sont connus en association avec des roches basiques du Rif et Haut Atlas Central, il n’en reste pas moins que le seul gisement exploité est celui de Bou Azzer (Région de Taznakt). Ce district aurait été découvert quand les autochtones avaient noté les capacités raticides d’un arséniure de cobalt (érythrine) et ayant fini par être l’un des plus beaux minéraux recherchés par les collectionneurs de minéraux de par le monde.
5.Les gisements manganésifères : La région de Ouarzazate constitue l’une des provinces métallogéniques les plus riches en indices de cet élément. A signaler que c’est dans cette région qu’un minéral, dénommé Marokite, avait été découvert au début des années 60. Actuellement, seul le gisement d’Imini est en cours d’exploitation. D’autres districts sont connus et avaient fait l’objet d’une exploitation. On citera en particulier le gisement de Bou Arfa.
6.Les gisements ferrifères : Plusieurs gisements sont connus mais on se limitera à citer les principaux. D’abord, Kettara qui avait été exploité pour la pyrrhotine (pour la production de l’acide sulfurique). Ensuite le district de Ouixane, dans la région de Nador et enfin les nombreux gîtes et gisements de Tafilalet (dont Imi n’Tourza) et d’Ait Amar.
7.les gisements argentifères : S’il existe un gisement qui mérite une mention spéciale, ce serait le gisement d’Imiter. Il avait fait le bonheur des tribus locales et la richesse de plusieurs dynasties dont les Almoravides. L’ampleur des travaux et des vestiges des « anciens » montrent si besoin est à quel point l’industrie minière était développée dans la région. De plus, c’De plus, c’est l’un des rares gisements de par le monde à être exploité pour l’argent en tant que minéral principal et avec une association minéral essentiellement argentifère. Signalons dans ce cadre la découverte en 1983 d’un nouveau minéral qui avait été dénommé « Imiterite » en référence à ce gisement. Un autre district, Zgounder, est connu dans le Siroua et avait fait aussi l’objet d’exploitation par les anciens.
8.Les gisements aurifères : Le Maroc n’a pas la réputation d’être un pays aurifère au même titre que certains autres pays africains. Toutefois, plusieurs indices et gîtes sont connus et exploités. On signalera d’abord le gisement d’Iourirn, dans la région d’Akka qui est en cours d’exploitation mais on signalera aussi l’ancien gisement de Tiouit, dans le Saghro, qui était exploité pendant la deuxième moitié du siècle dernier. Un gisement de cuivre aurifère est en cours d’exploitation dans la région de Seksaoua (région d’Imi n’Tanout). Un autre gîte (Jbel Haouanite) est en cours d’exploitation dans la région de Bou Arfa. Ceci étant, plusieurs occurrences sont connues ici et là aussi bien dans le Rif que dans le Haut Atlas ou l’Anti-Atlas.
9.Les gisements antimonifères : Plusieurs gisements ont été exploités dans le Maroc Central et dans le Rif.
10.Les gisements fluo-barytiques : Le Maroc est l’un des principaux producteurs mondiaux de barytine. Plusieurs districts sont connus. On citera en particulier Jbel Ighoud, Seksaoua et Tafilalet. Mais le plus grand gisement reste celui de Zelmou, dans la région de Bou Arfa. Concernant la fluorine, le seul gisement en cours d’exploitation est celui d’El Hamam, dans la région de Khémisset. D’autres gisements avaient été exploités dans la région de Taourirt (Jbel Tiremmi) et dans le Maroc Central (Zrahina)
Par Addi AZZA