En raison de sa structure géologique très variée, le sous-sol marocain renferme de nombreux gisements miniers qui font l’objet d’exploitation et de valorisation à grande échelle (phosphates, métaux de base, métaux précieux, substances utiles,..), conférant à ce secteur un rôle important dans l’économie nationale.
Cependant, l’exploitation de ces richesses n’est pas sans effet sur l’environnement et la santé des populations vivant dans les environs de ces sites. En effet, l’activité minière peut déséquilibrer les milieux naturels de plusieurs manières : par la transformation des paysages, le dépôt de déchets solides et le rejet d’effluents liquides et atmosphériques. Ce qui peut inévitablement porter préjudice à l’environnement et au cadre de vie des populations avoisinantes.
C’est dans ce cadre que le Département de l’Environnement a réalisé une étude pour l’évaluation des impacts environnementaux et sanitaires des exploitations minières qui a permis de :
• réaliser pour la 1ère fois un diagnostic des activités minières du point de vue de leurs impacts environnementaux, et d’identifier les aspects prioritaires auxquels il faudra faire face pour réduire ces impacts ;
• renforcer la prise de conscience des différents intervenants quant au rôle de la préservation de l’environnement et de la protection des ressources naturelles dans la perspective du développement durable du secteur ;
• promouvoir les activités de partenariat dans le domaine de l’exploitation durable des sites miniers, en conciliant les contraintes économiques et environnementales.
• définir les mesures à mettre en œuvre pour améliorer la gestion environnementale des sites miniers, notamment celles se rapportant à :
• L’intégration des coûts de la gestion environnementale et de la réhabilitation des sites miniers dans la structure financière des projets miniers.
• La réalisation d’analyses détaillées du rapport coûts-bénéfices des plans de gestion environnementale afin de démontrer qu’une bonne pratique environnementale entraîne un accroissement de la rentabilité.
• L’analyse des effets socio-économiques lors de l’évaluation des incidences environnementales des activités d’exploitation minières.
• L’intégration de la surveillance continue de la qualité de l’environnement aux programmes de gestion environnementale des activités minières.
Les évaluations environnementales et sanitaires détaillées menées dans le cadre de cette étude ont concerné 3 sites miniers pilotes et ont abouti à l’élaboration de plans d’action pour l’amélioration de la gestion environnementale au niveau des 3 sites et dont la mise en œuvre a été assurée par les exploitants miniers.
Évaluation des impacts au niveau de Casablanca
L’étude Casa Airpol que le Département de l’Environnement a mené en étroite collaboration avec le ministère de la Santé, consistait en l’évaluation de l’impact de la pollution atmosphérique sur la santé des populations dans le Grand Casablanca. L’impact de la pollution sur la santé a été mesuré à travers la surveillance de la qualité de l’air exprimée par les teneurs en fumées noires (indicateur de particules fines), et en se basant sur le suivi de l’état de santé des populations recueilli au niveau de plusieurs structures sanitaires de la Wilaya.
Les résultats de cette étude traduisent l’accroissement du risque pour la santé, en termes de mortalité et de morbidité (nombre de cas de maladies) en relation avec les augmentations des niveaux de la pollution atmosphérique enregistrés au cours de cette étude à savoir :
• niveau «de base» de pollution: 9 µg/m3 de fumées noires.
• niveau «moyen» de pollution : 22 µg/m3 de fumées noires.
• niveau «élevé» de pollution : 87 µg/m3 de fumées noires.
L’analyse des résultats obtenus a permis de conclure que lorsqu’on passe du niveau de base de pollution (9 µg/m3 de fumées noires) à un niveau moyen de pollution (22 µg/m3 de fumées noires), on observe des augmentations sensibles de certains événements de santé :
• 2 % de la mortalité brute
• 2 % des consultations pour asthme
• 6,1 des consultations pour conjonctivites
• 6,8 % pour infections respiratoires
Et lorsqu’on passe du niveau de base de pollution (9 µg/m3 de fumées noires) à un niveau élevé de pollution (87 µg/m3 de fumées noires), on observe des augmentations de certains événements de santé, pouvant aller jusqu’à :
• 9 % de la mortalité brute.
• 6 % des consultations pour asthme.
• 42,5 % des consultations pour conjonctivites.
• 14,6 % des consultations pour infections respiratoires.
L’étude Casa-Airpol a permis de mettre en évidence des relations statistiquement significatives entre le niveau de pollution atmosphérique mesuré par les teneurs en particules fines de type «fumées noires» et, la mortalité, les crises d’asthme et les infections respiratoires.
Évaluation liée à l’utilisation du mercure, plomb et cadmium
Le plomb, le cadmium et le mercure sont des métaux lourds très dangereux qui peuvent contaminer les milieux naturels et atteindre l’homme à travers la chaîne alimentaire. Le département de l’Environnement a réalisé un inventaire détaillé sur les utilisations et les émissions des trois métaux à l’échelle nationale, et a mené des évaluations environnementales et sanitaires de ces trois métaux au niveau de 3 sites pilotes.
Utilisations du Plomb, Cadmium et Mercure
Le recensement qui a été fait dans le cadre de cette étude, a démontré que les utilisations de ces trois métaux sont essentiellement dans les domaines suivants :
Pour le Plomb : production de plomb de fusion, fabrication des batteries et des feuilles en plomb et production des peintures.
Pour le mercure : industrie chimique et pharmaceutique, fabrication des batteries, production des produits électriques, électroniques et des appareils de mesure et de régulation.
Pour le Cadmium : industrie chimique et fabrication des batteries.
Les risques sanitaires liés aux trois métaux
• Rejets atmosphériques de plomb des unités de fabrication des batteries de Sidi Bernoussi -Pour cette évaluation sanitaire, quatre scénarios ont été construits par inhalation de poussières de plomb en considérant comme paramètre principal, la distance par rapport aux sources de pollution (de 100 m à 1800 m). Le risque sanitaire est exprimé par l’Indice de Risque (IR). Quand l’IR dépasse 1, les risques sont probables. Cet indice est calculé par rapport aux valeurs toxicologiques de référence internationale.
Les résultats de cette étude ont permis de déduire que les rejets de plomb près d’un site industriel constituent un risque sur la santé des populations avoisinantes aux sources de pollution, ce qui pourrait conduire à des plombémies critiques chez les enfants exposés.
• Emissions de mercure provenant de la décharge de Mediouna-Pour l’exposition au mercure, deux situations ont été étudiées : l’exposition par inhalation des vapeurs de mercure provenant des déchets pour les chiffonniers et les agents communaux travaillant sur le site de la décharge (durée d’exposition 6h/j) et l’exposition par ingestion des eaux de puits contaminées par les lixiviats pour la population des fermes en aval de la décharge.
Trois scénarios ont été construits pour l’inhalation aiguë et chronique en considérant comme paramètre principal, la profondeur des couches de déchets (0.5m, 1m et 2m) qui influe sur les quantités de mercure évaporé.
L’analyse des résultats a montré que les indices de risque sont trop élevés quelque soit le scénario étudié. Il en résulte des intoxications aiguës et chroniques très importantes pour tout individu séjournant dans la décharge au moins 6 heures/jour et avec une fréquence d’exposition de 6 jours/semaines.
Pour l’ingestion des eaux de puits contaminés, les risques d’intoxication sont peu probables en période sèche, ceci s’explique par la tendance du mercure à s’évaporer rapidement dans l’air. Cependant, en période de grandes pluies, les concentrations de mercure dans l’eau pourraient augmenter et les risques de contamination des eaux souterraines seraient très probables.
• L’ingestion du cadmium dans les produits de la mer de la Côte Atlantique au niveau de Jorf El Asfar – Cette évaluation des risques a été basée sur une approche hypothétique fondée sur l’ingestion de cadmium dans les produits de la mer avec une consommation de poissons et de moules, par un enfant de moins de 4 ans de poids moyen 10 kg, un enfant de 6 ans de poids moyen 20 kg et un adulte de 70 kg.
L’analyse des résultats a permis de conclure que les indices de risque sont trop importants pour les deux cas de figure cités ci-dessous:
– pour une consommation journalière de poissons avec une concentration maximale de cadmium, les indices de risques dépassent le seuil pour les adultes.
– pour une consommation journalière de poissons avec une concentration moyenne de cadmium, les indices de risques dépassent le seuil pour les enfants.
Evaluation des impacts liés à l’utilisation des pesticides dans la Région du Gharb-Chrarda-Beni Hssen
L’intensification de l’agriculture a engendré une augmentation de l’utilisation des intrants agricoles notamment les pesticides, ce qui peut constituer une menace sérieuse pour la santé et l’environnement. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus d’un million de personnes sont empoisonnées annuellement par des pesticides chimiques, dont 20.000 décès.
Au Maroc, environ 300 à 350 matières actives sont autorisées et entrent dans la composition de près de 1000 spécialités commerciales, dont plus de 80% homologuées pour utilisation agricole.
Au cours de la campagne agricole 2004-2005, les ventes ont concerné près de 12 000 tonnes de produits phytosanitaires, soit 9% de plus que la campagne précédente (11000 tonnes).
Les ventes ont ainsi porté sur 1320 tonnes d’herbicides, 4200 tonnes de fongicides et 6400 tonnes d’insecticides et autres produits. (Depuis cette date il ne nous est parvenu aucun autre chiffre -ndlr-).
Cependant, malgré cette importante augmentation, l’évaluation des conséquences environnementales de l’utilisation de ces produits, est très limitée. Concernant les données sanitaires, le Centre Anti Poison a enregistré entre 1989 et 2007, 10 332 cas d’intoxication aiguée par les pesticides, soit 14 % de l’ensemble des déclarations reçues.
C’est dans ce cadre, que le département de l’Environnement a entamé l’évaluation des impacts environnementaux et sanitaires des pesticides au niveau de la Région du Gharb-Chrarda- Beni Hssen, sélectionnée comme région pilote, en raison de sa vocation agricole. Cette étude a pour objectifs :
• la collecte des données disponibles sur les pesticides utilisés dans les cultures intensives au niveau de la zone étudiée (surfaces plantées, utilisations, commerce, stockage…etc).
• l’évaluation des nuisances générées par les pesticides au niveau de la zone pilote (évaluation de l’état de contamination des ressources naturelles : eau, air et sols, de pollution, caractérisation du devenir de cette pollution et modélisation des transferts).
• l’évaluation des risques sanitaires liés à la contamination des milieux naturels (expositions professionnelles, intoxications aiguës et chroniques).
• l’évaluation des coûts de dégradation liés à la contamination par les pesticides.
• l’élaboration d’un plan d’action pour réduire et prévenir les nuisances au niveau de la région et proposition des alternatives moins polluantes et économiquement acceptables.