Environnement
Exploitation et réhabilitation des décharges
Généralisation des plans directeurs pour toutes les préfectures et provinces
Le programme national de gestion des déchets ménagers (PNGDM), qui s’étale sur 15 ans (2008-2023), est réparti en plusieurs phases. Il vise la généralisation des plans directeurs pour toutes les préfectures et provinces en vue d’atteindre un taux de collecte allant de 90% en 2022 à 100% en 2030. Il est prévu dans ce contexte, de réhabiliter ou fermer les décharges existantes à (100%) en 2022 ; l’éradication des 300 décharges sauvages, et l’intégration de 150 autres dans le cadre des MDP (mécanismes de développement propre). Soutenant ainsi les décharges contrôlées avec la réalisation de centres techniques d’enfouissement et de valorisation au profit de tous les centres urbains (100%) en 2022.
En effet, le coût du service de collecte est passé d’une moyenne de 200 DH la tonne, dans le cas d’une gestion directe, à près de 400 DH par tonne en mode actuel projetant multiplier ce coût dans l’avenir. Ce coût est en calculé de la façon suivante : 100 DH la tonne pour la partie investissement, et 300 DH pour l’exploitation. Le coût de la mise en décharge est quant à lui estimé à 100 DH la tonne, (40 DH pour l’investissement et 60 DH pour l’exploitation). Concernant toutefois la réhabilitation des décharges, l’approche est différente, car elle touche l’intégralité de la population urbaine, estimée à 18 millions d’habitants. De plus, le coût de la réhabilitation est forfaitaire, dépendant du nombre d’habitants. Il est de 6 millions DH pour une ville de moins de 100.000 habitants, et de 10 millions DH si la population est comprise entre 100.000 et 300.000 habitants.
Compte tenu des conséquences en termes de qualité de vie, de santé publique, de ressources naturelles et de développement socio-économique, il est clair qu’il manque la professionnalisation du secteur, sachant qu’il est nécessaire d’optimiser, former et sensibiliser tous les acteurs concernés. Car le facteur humain n’est pas en reste, puisque ce programme peut permettre de créer 18.000 emplois, avec pour ambition d’intégrer les récupérateurs et chiffonniers dans le secteur formel.
Dans la continuité de cette logique, le développement de la filière de valorisation des déchets ménagers bénéficie d’une enveloppe de 680 millions DH, ce qui constitue 2% du budget total du PNGDM. Mais qui reste insuffisante car la récupération informelle, pendant les opérations de pré-collecte et de collecte des flux de matières, n’a pas été prise en compte dans toutes les campagnes de caractérisation réalisées. Sauf que le programme a prévu la collecte de 86% contre 46% en 2007, la conversion énergétique du biogaz dans les villes d’Oujda et de Fès, le démarrage du premier et unique centre de tri à Oum Azza à Rabat, et le lancement de 64 Plans directeurs provinciaux/préfectoraux dont 13 sont achevés.
Il conviendrait de dire que les résultats obtenus ne reflètent pas la réalité, et le taux d’enfouissement déclaré de 37% contre 11% en 2007 contient la fraction récupérable par recyclage, car on se limite à déverser les déchets dans l’enfouissement, sans améliorer et organiser la collecte. Le choix d’une telle approche repose sur différents critères, principalement le manque d’informations de la part des gestionnaires et des communautés sur les autres options de récupération, sur la nature et la composition du déchets ménager en relation avec les habitudes des citoyens.
Les projets en phase de réalisation nécessitent donc des investissements lourds, près de 200 millions DH. Pourtant, on peut constater un processus de génération d’énergie même au niveau des 23 décharges sauvages réhabilitées. La récupération de cette énergie potentielle est possible, moyennant un investissement plus «raisonnable», allant de 13 à 20 millions DH en fonction de la taille de la décharge. Étant donné l’importance de ces ambitions et des investissements nécessaires à leur concrétisation, un partenariat entre l’État et les collectivités locales a été instauré en ce sens. Ainsi, ces dernières supporteront la majeure partie du budget, à hauteur de 73%. Quant à l’État, sa participation est d’environ 12,9%, dont le tiers est mobilisé grâce à la coopération internationale ou à des prêts internationaux. La Banque mondiale a d’ailleurs accordé au Maroc un prêt de 1,12 milliard DH dans le cadre de son programme d’appui. Il s’agit d’un autre handicap, des charges lourdes que les collectivités ne peuvent supporter et du coût environnemental.
En se faisant, y a-t-il une alternative pour valoriser ces déchets à moindre coût ? Bien entendu, il y a aussi le compostage et l’incinération. Au Maroc, les 20 dernières années ont vu un certain nombre de projets naître pour répondre à ce besoin. Pratiquement tous n’ont pas fait long feu, en raison de l’hétérogénéité des déchets ménagers, encore une fois en l’absence de tri à la source.
La proportion fermentescible suggère que le compostage est la technique la plus prometteuse par rapport aux autres méthodes d’élimination des déchets. Néanmoins, un autre obstacle de taille pour les communes qui refusaient que de telles décharges soient établies sur leur territoire. Cela démontre l’existence de lacunes d’ordres organisationnel, institutionnel et de gestion, notamment en raison du chevauchement des rôles et responsabilités entre différents organismes.
Mustapha Boussetta
Président Association Initiatives de protection de l’environnement