Industrie
Industriels et prestataires de médicaments, quelle issue?
Hausse des prix, contrefaçon, corruption … Le «système Médicament» au Maroc vit un grand désordre malgré toutes les mesures prises pour y mettre un terme. C’est un secteur en manque de régulation, pourtant l’industrie pharmaceutique dans notre pays a connu un rebond d’investissements importants, une main-d’œuvre qualifiée et une croissance soutenue du marché
Avec un chiffre d’affaires de plus de 13,7 milliards dirhams, et 38 laboratoires, 33 sites de production, 50 distributeurs et plus de 11 000 officines, le Maroc trébuche encore sur la régulation du secteur. Car en 1999, le ministère de la Santé avait formulé une demande pour transformer la direction du médicament en Segma comme premier pas vers la création d’agence nationale du médicament. Une agence indépendante et autonome financièrement. Mais hélas ! cette idée n’aboutira pas et restera dans les tiroirs du ministère jusqu’à ce que le précédent ministre de la Santé L’houssaine Louardi l’exhume en 2017, et que son successeur Anas Doukkali décide de travailler dessus.
Il ne faut pas oublier qu’actuellement, le ministère est prestataire de soins, acquéreur de médicaments, autorité qui délivre les autorisations de mise sur le marché et qui assure le contrôle. L’octroi des autorisations de mise sur le marché, des certificats d’enregistrement ou la réalisation d’études de bio-équivalence, sont des exemples des tâches qui incomberont à la future agence nationale du médicament. Le contrôle, lui, restera un attribut du ministère. Hors le concept de l’agence est encore à ses balbutiements. Le ministère n’a pas encore d’éléments concrets sur son organisation ou son fonctionnement. Mais l’idée principale est de mettre en place une agence sous forme d’établissement public indépendant.
Le Maroc, avec ses 70 ans d’expérience dans la manufacture locale de médicaments couvre près de 70% du marché locale. Pour l’export il envoie de 8% de sa production, à 20% chez certains laboratoires, réservés pour l’Afrique subsaharienne et la zone MENA, et dans certains cas vers l’Europe, notamment la France, l’Allemagne et les pays d’Amérique du Nord, sans oublier l’Afrique, l’Asie et le Monde arabe. A noter qu’un potentiel de développement estimé à 105,3 millions de dollars/an, en dépit d’une balance commerciale moyenne la production pharmaceutique a clôturé l’année 2015 à 3,9 milliards Dirhams, soit 2% du PIB qui devrait atteindre 2,2% d’ici 2020 selon les prévisions de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP).
Concurrence illégale
Compte tenu de l’évolution du secteur mondial vers les nouvelles générations de médicaments biotechnologiques, la concurrence asiatique et moyen-orientale, l’émergence de nouvelles maladies contre lesquelles les molécules classiques sont inefficaces sont autant de facteurs qui minent le modèle classique de cette industrie. Certains laboratoires tentent de réagir en entamant une transition timide vers des médicaments à haute valeur thérapeutique en s’ouvrant aux marchés extérieurs, y compris en Afrique mais en vain, la concurrence fait rage.
Récemment, les médias ont tiré la sonnette d’alarme au sujet de ce qui a été décrit comme une concurrence étrangère déloyale, menaçant l’industrie locale. Cela laisse dire que des labos étrangers seraient disposés d’autorisation d’importer massivement des génériques, dont certains sont déjà en production au Maroc, (loi 17-04 qui stipule que tout laboratoire étranger doit disposer d’un site de production sur le territoire) avant même autorisation de marchander son produit. Lacune textuelle certes.
A ce sujet les patients marocains, et devant ce vide juridique et de bourses modestes, s’adressent malgré eux aux marchés dans les deux conclaves Ceuta et Melilla, lesquels fournissent des médicaments à bon prix à satisfassent leur demande. Soit, un médicament de 8,12 euros en Espagne vaut 16,50 euro au Maroc… Allons y savoir…