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Entretenir en marge du 4ème SIMC avec S.E.M. Abdu Razzaq Guy Kambogo, Ambassadeur, Haut Représentant de la République Gabonaise, près le Royaume du Maroc

Maroc/Gabon: convergence de vues

Le magazine «énergie/mines et carrières» saisit l’opportunité de l’étroitesse de la coopération existant, depuis déjà de nombreuses années, entre le Royaume du Maroc et la République Gabonaise, pour s’entretenir avec S.E.M. Abdu Razzaq Guy KAMBOGO, Ambassadeur Haut Représentant de la République Gabonaise, près le Royaume du Maroc. Entretien au cours duquel, le Représentant de la mission diplomatique de la République Gabonaise au Royaume du Maroc, s’est longuement épanché sur la coopération entre le Gabon et le Maroc dans les secteurs de l’industrie minière et de l’investissement entre les deux pays.

énergie/mines et carrièrers: Excellence, la dernière visite du Roi Mohammed VI au Gabon, en Juin 2015, aura permis d’intensifier et de booster la coopération entre les deux pays.  Comment se présente cette coopération bilatérale aujourd’hui, notamment au niveau du secteur minier ? 

S.E.M. A.R.G.K. Depuis l’établissement de leurs relations diplomatiques, nées sur la base des relations fraternelles, le Maroc et le Gabon entretiennent des liens étroits, ayant pour fondement l’amitié sincère et profonde qui liait Feu Sa Majesté le Roi Hassan II et Feu le Président El Hadj Omar Bongo Ondimba. Cette relation d’une étroitesse exceptionnelle s’est poursuivie entre Sa Majesté le Roi Mohammed VI et le Président Ali Bongo Ondimba.

Comme vous l’avez mentionné, les derniers voyages de nos deux Chefs d’Etat, dont le séjour en juin 2015 à Libreville de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, ont eu un effet de dynamisation et de propulsion dans bien des secteurs. Sur le plan minier, puisqu’il s’agit singulière de ce secteur ici, la coopération entre le Gabon et le Maroc évolue crescendo d’année en année.

Plusieurs axes de coopération dans le domaine minier ont été identifiés et mis en œuvre, de la signature de Convention à l’exploitation des mines, en passant par l’élaboration et l’exécution d’études et de projets communs, y compris la formation pour divers niveaux.

On le sait, le sous-sol gabonais regorge de nombreuses opportunités d’investissement. Quels sont les minerais les plus prisés par les sociétés marocaines opérant au Gabon?

Le partenariat, déjà très ancien avec le Maroc, s’est considérablement renforcé ces dernières années. On assiste aujourd’hui à une totale convergence de vues sur les stratégies d’industrialisation en mettant en exergue les moyens à même de renforcer les relations de coopération économique et de partenariat bilatéral. Le Gabon s’est engagé dans un vaste programme économique qui vise à renforcer son économie par la diversification. Bien évidemment l’industrie minière occupe un place prépondérante, au regard de l’immense richesse du sous-sol gabonais.

Deuxième producteur mondial de manganèse, le Gabon compte pas moins de 900 indices miniers (manganèse, cobalt, terres rares, zinc, uranium, argent, phosphate, etc.) et seulement 25% de son potentiel minier est actuellement exploitées.

A ce jour, les entreprises marocaines telles que MANAGEM, l’ONHYME sont plus particulièrement présent dans l’exploitation de l’or. Depuis le mois de février 2012, le Groupe MANAGEM exploite une mine d’or dans la Région de Bakoudou, à plus de 650 kms, au sud-est de Libreville, dans la province du Haut-Ogooué et ouvre progressivement d’autres champs. Quant à l’ONHYM, grâce à son partenariat avec la Société Equatoriale des Mines (SEM), une société gabonaise, des projets communs sont en cours de mise en œuvre. Or cette expertise marocaine est aussi attendue dans d’autres exploitations minérales.

C’est dire combien le Gabon attend de la coopération sud-sud, notamment celle avec le Maroc, pour mieux affiner ses stratégies d’industrialisation. D’ailleurs dans cette optique, à côté des richesses de son sous-sol, le Gabon propose, en plus d’une Zone à régime privilégié, la Zone Economique Spéciale de Nkok, d’un Code Minier très adapté à la donne économique actuelle, il y consent des avantages fiscaux très attrayants. Par exemple, les opérateurs économiques désireux d’y investir sont exonérés de la Taxe sur les Bénéfices pendant 10 ans. Ils profitent également de l’exonération des droits de douane des intrants et de l’impôt sur le bénéfice pour le 1er exercice bénéficiaire. Et si le marché gabonais est étriqué, il reste ouvert sur 20 millions de consommateurs des pays de la Région.

Le Groupe OCP exploite d’importantes ressources de phosphate. Envisage-t-il, au Gabon, la création d’unités d’engrais industriels ?

La mutualisation de leurs ressources naturelles respectives, pour une meilleure capitalisation au profit de l’Afrique est l’un des axes stratégiques entamés par le Gabon et le Maroc. Dans ce cadre, le Groupe OCP et la SEM, ont en effet signé en 2014 une importante Convention, jugé révolutionnaire et très ambitieux par certains observateurs, pour la création d’une deux usines intégrées de production d’engrais naturels adaptés à nos sols. L’accord prévoit que cette joint-venture sera basée à la fois au Gabon et au Maroc, et qu’il sera totalement intégré dans la mesure où il couvrira toutes les activités, de la production minière à la commercialisation des engrais, y compris la production d’ammoniac et l’acide phosphorique

Le Maroc, on le sait, possède d’importantes ressources de phosphates, qui sont exclusivement exploitées par le Groupe OCP qui est devenu le leader mondial dans l’extraction et le traitement de ces minerais. Le Gabon, quant à lui, dispose de grandes réserves de gaz naturel et les ressources potentielles en phosphates et de potasse.

Ce grand projet au quel nos deux Chefs d’Etat accorde une très grande importance et attendent avec impatience sa concrétisation a connu un retard par rapport aux prévisions, mais il suit son cours.

Pour répondre activement à l’exportation de la métallurgie légère, le Gabon nourrit des ambitions dans l’industrie de transformation de fer. Avec le risque que les cours du marché de l’acier dans le monde ne sont pas au beau fixe, quelles sont les prévisions ?  D’autre part, concernant la production du manganèse, comment se présentent les convoitises par rapport au marché chinois ?

Nous le savons tous que l’Économie mondiale est variable et les cours des matières, quelles qu’elles soient, varient suivant la loi de l’offre et de la demande. Dans cet ordre, les courbes sont parfois trop longues, défavorables pour certains favorables pour d’autres, mais chacun se retrouve à un moment ou un autre. Nous savons aussi que depuis quelques années des crises se succès les unes après les autres   ralentissent de façon générale les investissements entrepris dans nos différents États. Cependant, les besoins en développement d’infrastructures se posent avec acuité, aussi bien dans les pays en développent que dans les pays développés, ce qui suppose, pour répondre à votre préoccupation, que le cours de l’acier va inévitablement se relancer.

Malgré les crises économiques, financières et pétrolières successives, l’économie du Gabon qui se diversifie progressivement jouit d’une stabilité macroéconomique avérée et d’une situation financière relativement bonne, favorisées par le nouveau Plan de Développement que renferme le Plan Stratégique Gabon Émergent. Le pays fonde, en effet, d’énormes espoirs sur ses réserves de fer, notamment dans la région de Belinga (nord-est) dont les réserves sont estimées à 2 milliards. Ressource encore inexploitée et qui pourrait produire jusqu’à 43 millions de tonnes d’ici 2025.

Concernant le manganèse dont le Gabon a récemment inauguré sa première usine de transformation, le pays s’enorgueillit d’aller enfin plus loin que l’extraction simple du minerai, ce qu’il s’était contenté de faire depuis plus d’un demi-siècle. Des retombées en termes de valeur ajoutée sont désormais perceptibles et encouragent fortement à maintenir le cap de la transformation locale.

Mais vous faites bien de le souligner : la demande mondiale de manganèse est très largement influencée par l’évolution de la production d’acier (90 % de la production de manganèse est utilisée pour la préparation d’alliages, principalement d’aciers) et plus particulièrement de l’acier produit par la Chine, cette dernière étant -de loin- le principal contributeur mais aussi le premier consommateur. Le dynamisme de l’économie chinoise au cours de ces 15 dernières années a en effet largement tiré la demande mondiale d’acier. Les besoins de l’industrie chinoise ne pouvant être couverts par la seule production nationale, les importations chinoises de manganèse ont ainsi connu une progression en volume. L’an dernier, en dépit du léger ralentissement de la croissance, elles ont continué à croître de façon très soutenue.

Qu’à cela ne tienne, figurant parmi les 5 producteurs mondiaux majeurs, le Gabon continuera de tirer son tirer son épingle du jeu. Le pays dispose, en effet, d’un minerai de haute qualité qui le classe parmi les meilleurs du monde. Il vient aussi de découvrir un nouveau gisement dont les réserves sont estimées à 60 millions de tonnes dans le Sud-est.

Au regard de l’intérêt que tout ceci suscite, eu égard à une présence d’opérateurs diversifiés avec l’arrivée d’un Groupe indien, Mohan Exports India PVT, nous pensons aisément que bien malins ceux qui s’activeront à se positionner au Gabon qui, géostratégiquement et politiquement offre des atouts indéniables dans le secteur miniers.

A quelle hauteur le Fonds Européen de Développement (FED) contribue-t-il  à la promotion de l’industrie minière au Gabon? Vers quels secteurs axe-t-il ses priorités ?

Le « Gabon Industriel » l’un des piliers décliné dans son Projet de Société par le Président Ali Bongo Ondimba a pour enjeu de promouvoir la valorisation locale des matières premières et l’exportation de produits à haute valeur ajoutée.

C’est en prenant en compte ce pilier économique que le FED s’est engagé à accompagner le Gabon dans sa détermination à diversifier l’économie, tout en privilégiant une exploitation durable des nombreuses matières premières qui sont disponibles sur le territoire gabonais.

Hormis l’intérêt porté aux réserves considérables de pétrole et de gaz, le FED suit aussi avec attention divers autres secteurs et potentialités minières, notamment le manganèse, le minerai de fer, l’or, le diamant, le plomb/zinc, le niobium et phosphates, le sel de potasse, le magnésium.

Le Gabon est réputé pour ses filières industrielles en énergie fossile, en gaz et en pétrole. Quelles sont aujourd’hui les opportunités écologiques les plus appropriées pour le pays ?

Dans de nombreux pays les énergies renouvelables se développent, même si pour le moment elles restent «minoritaires». Elles ont un double avantage : elles n’émettent pas de CO2 et sont inépuisables.

Depuis janvier 2010, le torchage du gaz est interdit au Gabon. Depuis, la filière s’industrialise et des opportunités d’investissement existent dans les nouvelles de récupération et de réinjection, plus écologiques et plus rentables, afin de respecter les engagements internationaux en matière de développement durable. De plus, le gaz est de plus en plus sollicité dans diverses industries.

Par ailleurs, disposant de nombreux cours d’eau, le Gabon présente de nombreuses opportunités en matière d’énergie hydraulique. Certaines zones habitables situées dans des îlots offrent aussi des possibilités d’investissement dans des énergies solaires.

L’exploitation forestière est présentée comme une priorité par le Gouvernement gabonais. Dans la perspective de la COP 22 qui doit se tenir prochainement à Marrakech, quel message, la Représentation Diplomatique Gabonaise au Maroc, voudrait-elle  transmettre ?

Le Chef de l’Etat Gabonais, Ali Bongo Ondimba ne cesse de réaffirmer sa volonté de voir l’Afrique «faire partie effectivement de la solution» que doit apporter l’humanité au défi complexe posé par les changements climatiques.

Aujourd’hui, il est admis que la déforestation représente environ 20 pc des émissions mondiales de gaz à effet de serre, c’est pourquoi le Gabon, pays recouvert de foret à 88 pc, s’est engagé à maîtriser et à encadrer les différents usages de terres forestières à travers une planification optimisée de l’utilisation de ses terres, suivie justement par la Station de réception directe de l’AGEOS.

Le Gabon figure aujourd’hui parmi les pays africains les mieux avancés en termes de production d’énergie propre. Actuellement, à peu près les trois quarts de la consommation d’énergie à travers le pays sont assurés par des énergies non polluantes, notamment l’hydroélectrique.

De même que des dispositifs opérationnels de surveillance mis en place par l’AGEOS permettent désormais de suivre l’évolution du littoral gabonais et d’en étudier les variations.

Ces compétences peuvent aujourd’hui être partagées avec plus de 20 pays inclus dans le cercle de réception de notre antenne, avec lesquels nous partageons les mêmes problématiques environnementales et climatiques.

Les productions d’énergies hydroélectriques au cours des dernières années ont déjà permis d’éviter l’émission de quelque 530.000 tonnes de CO2 par an, selon les estimation des spécialistes.

Outre ces actions préventives et opérationnelles, le Gabon a amorcé ses stratégies d’adaptation de l’économie, notamment dans la filière Bois, par l’interdiction stricte de l’exportation des grumes, décidée dès 2010 par le Président Ali Bongo Ondimba. Tout en favorisant la transformation locale du bois, afin de créer une forte valeur ajoutée sur les produits issus de cette filière et favoriser la création de nombreux emplois directs et indirects, la Gabon a considérablement réduit la forte pression exercée sur ses forêts.

De plus ces actions combinées aux parcs nationaux créés, à la lutte acharnée contre la criminalité faunique permettent aussi la préservation de notre écosystème naturel. Ce qui ouvre la voie à l’émergence de nouveaux métiers et de nouveaux secteurs rattachés à l’Économie Verte, faisant du Bassin du Congo auquel appartient le Gabon, une source très importante de nouvelles opportunités d’affaires dans ces nouveaux secteurs. De même, on découvre progressivement que les produits forestiers non ligneux, ainsi qu’une agriculture durable font partie aujourd’hui de la solution.

Par conséquent, la communauté internationale doit tout particulièrement honorer ses engagements quant à l’Initiative pour le développement des énergies renouvelables en Afrique. Cette initiative est, en effet, un des éléments concrets du plan d’action de Paris et dont la mise en œuvre devrait favoriser un développement basé sur la lutte contre les changements climatiques en Afrique, en particulier pour accompagner les États les plus vulnérables.

Pour plaider en faveur du déploiement de cette initiative, le Maroc peut compter sur le soutien indéfectible et très engagé du Gabon.

 

Entretien réalisé par Mohamed Moudarir

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