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Les routiers en controverse avec le ministère de tutelle

Le sentiment de gréver plane sur le niveau des négociations

Les routiers en ces derniers jours reviennent à la charge qualifiant les négociations avec le ministère des Transports et de la Logistique de questions épineuses, une rotation qui se poursuit entre les deux parties depuis le 5 février dernier. Rappelons que le ministère, en la personne de M Amara, s’est engagé dans une précédente rencontre  de se réunir avec chacune des catégories de représentants des professionnels, afin d’enrichir les propositions qui, en premier, portent sur la carte professionnelle, la charge, la procédure de renouvellement du parc, le régime fiscal et le contrat-programme. Ainsi que les catégories des transporteurs exploitant des véhicules de moins de 19 tonnes. Notant que le ministère a pris sur lui d’activer les précédentes circulaires émises en 2003, 2007 et 2010, permettant à un certain nombre de transporteurs de bénéficier de l’augmentation de la charge de leurs camions, et à la généraliser pour ceux qui n’en avaient pas bénéficié.

Les transporteurs de marchandises prennent le ministre au mot. Suite aux grèves du dernier trimestre 2018, A. Amara dans un PV de réunion, s’était engagé à faire preuve de souplesse allant jusqu’à 30% de surcharge. Une décision provisoire certes, mais étonnante dans un pays où les accidents de la circulation sont le menu quotidien de nos routes, un fléau de près de 3.500 morts chaque année. Répliquant à cette proposition mitigée, les transporteurs de marchandises déclenchèrent la grève du jeudi 28 février à Casablanca, qui allait s’étendre à d’autres régions. Ce mouvement social, prenant acte depuis vendredi dernier, via des sit in devant le marché de gros de Casablanca et dans d’autres lieux commerciaux, expose le blocage des pourparlers. Une action qui ne tardait à faire impact sur les prix des fruits et légumes laissant prédire que l’appel à la grève est une réplique à l’approche controversée du ministre, s’attachant au miniscule sujet de tolérance sur la surcharge, se résumant en cet unique point sans tarder sur le reste des revendications. Une appréhension que Mohamed Mahdi, président de l’Union syndicale des professionnels du Maroc, trouve légitime. Qualifiée d’hypothétique par les fédérations et syndicats de transport routier de marchandises, affiliés à la CGEM, qui ne la cautionnent pas, lancent-ils dans un communiqué, les désolidarisant de ce mouvement. Prétextant qu’ils sont à défaut, contre la surcharge qui génère frauduleusement une concurrence déloyale aux entreprises transparentes. Soutenant que seuls  concernés par la grève les propriétaires des petits camions entre 3,5 et 19 tonnes, qui utilisent la surcharge comme argument concurrentiel. Mais, dans la limite, le dossier revendicatif fait mention de plusieurs points à débattre, et pas seulement celui de la surcharge.

Cette grève rappelle toutefois les dérives de l’économie de rente, qui fait fonction de référence dans notre pays, et les travers d’une réforme mal engagée dans le domaine du transport de marchandises depuis 2003. Les camions en question, qui seraient au nombre de 40.000 selon les estimations de la profession, sont déjà en surcharge à vide par rapport à leur état initial. Pour pouvoir transporter jusqu’à 16 tonnes de marchandises, au détriment de la charge utile qui ne devait pas dépasser le quart, les propriétaires procèdent aux différentes transformations tels l’utilisation de pneus de gros camions, le changement d’amortisseurs, l’extension du châssis, un deuxième réservoir de carburant, etc. Du coup, le véhicule se retrouve en surcharge même en étant vide. Ce qui représente un risque certain pour la sécurité, sans oublier les implications en termes d’usure de la chaussée et la concurrence déloyale envers les autres opérateurs qui ne pratiquent pas la surcharge. Donc outre la tolérance de la surcharge, le ministre du Transport avait également promis d’accélérer la couverture sociale en faveur des salariés du secteur, l’instauration du gasoil professionnel… Le catalogue des promesses prévoit également la gratuité de la formation professionnelle obligatoire. Les personnes concernées attendent toujours la mise en œuvre de cet engagement et s’abstiennent de s’inscrire auprès des établissements de formation.

En effet, il y a quelques années, face à la rareté des licences concernant les camions de 8 tonnes et plus, les transporteurs de marchandises se sont rabattus sur l’achat de petits véhicules de 3,5 tonnes ne nécessitant pas d’agréments. Apportant des changements aux charpentes des véhicules pour les rendre compatibles avec le tonnage voulu, des fois quadruplant leur capacité même. Devant cette donne le gouvernement semble n’a aucune vision de règlement, sachant que son prédécesseur le gouvernement Al Fassi, il y a plus de dix ans, et sous l’autorité du ministre des transports de l’époque K.Ghallab, instituant le code de la route 2010, aurait fait de la normalisation de la surcharge une figure de loi depuis 2010, s’inclue aujourd’hui comme désuète. A supposer que la promesse du ministre Amara, prévoyant une tolérance pratique de 30% de surcharge est positive, cela n’écartera pas les implications techniques et financières auxquelles les transporteurs succomberont. Le fait de passer de 3,5 tonnes à 12 ou 16 tonnes entraînera automatiquement le changement de catégories de permis qui doit passer de classe B à C. ‘Cette mutation juridique, précise Abderrahim Chennaoui, directeur de la Fédération nationale du transport de marchandises sur routes et ports, affiliée à la CGEM, impose aux professionnels de se faire acquitter de la vignette qui sera d’au moins 7.500 DH par an au lieu de 3.000 DH». Une suggestion à ne pas écarter.

Un autre problème, faisant option de modernisation du secteur, est d’ordre réglementaire, il demeure une équation de mise à niveau du personnel au commande des véhicules. Il s’agit en fait de la formation qui devait faire mention de gratuité, incombant à l’Etat, la charge de formation professionnelle. Initialement obligatoire pour obtenir la carte professionnelle,celle-ci continue à se reporter à plusieurs reprises prétextant l’ouverture de centres de formation. Du coup, des instructions étaient régulièrement transmises aux agents de contrôle pour fermer les yeux sur les chauffeurs n’ayant pas suivi la formation obligatoire, dont aujourd’hui le ministère du Transport tolère cette lacune en diffusant une circulaire pour reporter cette obligation à l’échéance 2021.

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