Reportage

Projet Arganier

Mise à niveau et structuration des coopératives féminines

L’expérience de l’Association Nationale des Coopératives d’Argane (ANCA) en matière d’appui à la mise à niveau et la structuration des coopératives féminines de production et de commercialisation des produits d’Argane et l’expérience du projet arganier liée à la préservation et la gestion durable de l’arganeraie, y seront également développées.

Le projet Arganier, fruit d’un partenariat entre l’Union européenne (avec un co-financement à hauteur de 6 millions d’euros) et l’Agence de développement social, a d’ores et déjà permis d’obtenir des résultats très importants et des impacts tangibles.
Ainsi il a permis de soutenir la mise à niveau et la structuration des coopératives féminines de production et de commercialisation des produits d’argane à travers le financement de 66 projets de mise à niveau de coopératives arganières pour un montant de 24,82 millions de dirhams, la mise en place et le développement des groupements de coopératives (4 groupements d’intérêt économique, deux unions de coopératives et l’Association Nationale des Coopératives d’argane – ANCA) à travers 16 projets pour un montant de 12,43 millions de dirhams et la mise en oeuvre de 4 programmes transversaux avec 333 jours de formations et deux programmes d’alphabétisation fonctionnelle au profit de 3000 femmes membres des coopératives d’argane.
En partenariat avec les associations de développement local et la Direction Régionale des Eaux et Forêts, le projet Arganier a également financé 24 initiatives de préservation et gestion durable de l’arganeraie pour un montant global de 18,27 millions de dirhams entre 2005 et 2008.
Par ailleurs, 9 programmes de recherche-développement ont été appuyés à travers des laboratoires de recherche nationaux et internationaux, pour un montant de 11,06 millions de dirhams.

A l’origine, un arbre
Si en Afrique, certains pays relate fièrement le nom de Baobab comme symbole de grandeur éternelle, au Maroc, et particulièrement, dans les montagnes du Sud, le nom qui reflète cette même grandeur et traduit de grandes qualités est sans conteste celui de « Arganier ». Un arbre qui est derrière la naissance de bien des richesses émergeants d’un rude environnement. L’arganier ou de son no, scientifique Argania spinosa est un arbre endémique(*) du Maroc (dans la région du sud-ouest et en particulier la plaine du Souss) et est de la famille des Sapotacées. Il a connu plusieurs appellations vernaculaires : arganier, argane, argan, bois de fer. Il était précédemment appelé Sideroxylon spinosum, puis Argania sideroxylon.
L’arganier daterait de l’ère tertiaire, époque où existait vraisemblablement une connexion entre la côte marocaine et les îles Canaries. Il se serait alors répandu sur une grande étendue entre le Maroc et l’Algérie ; puis, au quaternaire, l’arganier aurait été refoulé vers le sud-ouest par l’invasion glaciaire. Cela expliquerait l’existence actuelle de quelques colonies dans la région de Rabat (région de Khémisset) ; au nord du Maroc, près de la côte méditerranéenne dans les monts Béni-Snassen, au nord-ouest d’Oujda . Aujourd’hui la plus grande concentration d’arganiers se trouve dans la région du Souss où elle couvre près de 800 000 hectares, soit 14,25 % de la forêt du Maroc. Dans cette région, l’aire de l’arganier s’étend de l’oued Tensift au nord, à Tiznit et Tafraout au sud, et aux abords du djebel Siroua à l’est. L’arganier pousse depuis le niveau de la mer jusqu’aux environs de 1 500 m d’altitude. Depuis 1998, une zone de 830 000 hectares entre Agadir et Essaouira a le statut de « Réserve de la biosphère » octroyé par l’UNESCO.
L’arganier est un arbre aux rameaux épineux – d’où spinosa – de 8 à 10 m de haut, aux feuilles atténuées en un court pétiole, très résistant et qui peut vivre de 150 à 200 ans. Il est parfaitement adapté à l’aridité du sud-ouest marocain et sa silhouette est caractéristique : cime large et ronde, tronc noueux, tortueux et assez court, souvent formé de plusieurs parties entrelacées.
L’arganier fournit un bois très dur, appelé bois de fer, utilisé essentiellement comme bois de chauffage. L’arganier possède des mécanismes qui limitent ou ralentissent la chute du potentiel foliaire et relèvent de la stratégie d’évitement. L’arbre ne perd ainsi ses feuilles que transitoirement, en cas de grande sècheresse.
Les fleurs blanches à jaune verdâtre sont hermaphrodites, gamopétales à tube très court et sont réunies en glomérules. Elles apparaissent en mai-juin. Le fruit, l’affiache, est une fausse drupe ovale, fusiforme de 30 mm de long environ, jaune-brun à maturité contenant une noix très dure abritant deux ou trois « amandons ». Un arbre en produit environ 8 kg par an. Les feuilles, vert sombre et coriaces, sont consommées par les chameaux. Dans le sud marocain, il est fréquent de voir des chèvres s’étant hissées sur les branches de l’arganier car elles se nourrissent de jeunes pousses et de son fruit, laissant le noyau qu’il contient.
Son système racinaire est particulièrement profond mais dépourvu de poils absorbants (racines « magniloïdes ». Il profite d’une symbiose avec différents types de champignons pour pallier cette déficience, seuls ces derniers pouvant apporter les différents nutriments à l’arbre. La reproduction artificielle et la mise en culture de celui ci nécessite ainsi l’inoculation de plusieurs espèces de champignons au niveau de ses racines. L’aire géographique de l’arganier bénéficie d’une forte humidité, tant par les précipitations saisonnières que par une fraîcheur relative, que l’arganier piège et restitue au sol. La population Imazighen (berbère) de l’Atlas a toujours utilisé l’huile d’argan pour ses vertus alimentaires et cosmétiques. Tout comme le thé, l’huile d’argan accompagnée de miel est offerte aux invités en signe d’hospitalité, dans la région du Souss.

Des problèmes multiples 
Aujourd’hui, L’arganier est menacé de disparition, car les signaux d’alarme se multiplient ces derniers temps à propos de cet arbre : il subit diverses agressions.
L’arganeraie marocaine régresse en termes de superficie et surtout de densité : en moins d’un demi-siècle, la densité moyenne de l’arganeraie nationale est passée de 100 arbres/ha à 30 arbres/ha, tandis que les superficies couvertes régressaient en moyenne de 600 ha par an. L’aire de l’arganier se dégrade d’année en année sous l’effet conjugué de l’accroissement de la population (surtout autour d’Agadir), de l’apparition des cultures intensives (notamment le maraîchage sous serres). A cela s’ajoute une utilisation sauvage du bois d’arganier pour produire du charbon de bois et un manque de collaboration, assez longtemps constaté, entre les principales parties concernées (les aménageurs forestiers et les chercheurs universitaires) pour mettre en place des projets de transplantations. Et l’absence de moyens modernes de production de l’huile d’arganier, et mauvaise commercialisation de cette dernière par les autorités locales et régionales.
La problématique et l’enjeu sont donc actuellement, non seulement d’enrayer le processus de régression de l’arganeraie, mais aussi de replanter une partie de ce qui a été perdu, afin que l’arganier redevienne ce qu’il a toujours été : un pivot dans un système agraire traditionnel, basé sur l’exploitation de l’arbre, l’élevage et la céréaliculture. Les problèmes de l’arganeraie étant essentiellement dûs aux conséquences d’une interaction irrationnelle de l’homme avec son milieu environnant dans cette aire, il semble que toute politique de réhabilitation de cette espèce végétale, si elle veut connaitre quelque chance de succès, doit obligatoirement s’attacher à rationaliser cette intervention de l’homme sur la nature, et donc s’articuler nécessairement autour des actions ou objectifs prioritaires suivants :
information et sensibilisation des usagers, mais aussi de toute l’opinion publique nationale, sur les spécificités, l’importance et l’intérêt de la conservation de cet arbre ;
replantation et développement de l’arganier, par l’allocation des moyens nécessaires aux travaux de recherche scientifique en cours sur les techniques de reproduction et de transplantation, par la mise au point de techniques appropriées d’exploitation et de valorisation des produits de l’arganier ;
ouverture sur des coopérations internationales, pour financer tous les projets de replantation, et il serait utile que le Maroc cherche des coopérations étrangères pour accélérer les replantations ;
limiter l’exploitation de l’arganier par la mise en place d’un calendrier annuel, afin de laisser cet arbre se développer naturellement.
La production d’huile d’argan représente une ressource économique très importante pour les coopératives actives dans l’arganeraie. Ces coopératives ont des méthodes de fonctionnement aussi variées qu’il en existe. Certaines ont des pratiques issues du commerce équitable et peuvent être en partie financées par de grands organismes tel le cas de l’ANCA. Comme simples chiffres approximatifs de l’argan soulignons que près de 2 000 personnes travaillent dans les coopératives marocaines consacrées à l’huile d’argan. La production annuelle est de l’ordre de 2 500 à 4 000 tonnes avec quelque 800 000 hectares plantés. Perte de 600 ha/an de la surface plantée depuis le début du siècle dernier en arganiers. La densité d’arbre par hectare varie suivant la région : de 250 arbres par hectare à 150 km au nord d’Agadir dans l’Atlas et environ 40 arbres dans le désert bordant la région de Guélmime (Anti-Atlas). Notons aussi qu’un arbre produit, chaque année, de 10 à 30 kg de fruit environs. Il faut environ 38 kg de fruit (affiache) ou bien 2,6 kg d’amandons pour produire 1 litre d’huile. L’arbre pousse quasi-exclusivement au Maroc.

(*) L’endémisme caractérise la présence naturelle d’un groupe biologique exclusivement dans une région géographique délimitée. Ce concept, utilisé en biogéographie, peut s’appliquer aux espèces comme aux autres taxons et peut concerner tous sortes d’êtres vivants : animaux, végétaux ou autres. Une espèce endémique (ou un taxon endémique) l’est obligatoirement par rapport à un territoire nommé : le koala est endémique de l’Australie, le cyprès de Lambert est un arbre endémique de la Californie (même s’il a ensuite été planté dans le monde entier). Les espèces endémiques d’une aire géographique forment un sous-ensemble des espèces présentes naturellement, sans que l’homme en soit la cause, appelées espèces indigènes. Mais de nombreuses espèces indigènes peuvent ne pas être endémiques si elles existent naturellement dans d’autres régions de la planète. Le taux d’endémisme est un des indicateurs et éléments d’appréciation de la biodiversité .C’est pourquoi la méditerranée et ses abords sont considérés comme un des « hotspots » planétaires pour la biodiversité.

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