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Platine

Le drame de Marikana en Afrique du Sud

Les événements tragiques de Marikana en Afrique du Sud ne sont malheureusement que l’expression d’une frustration longtemps couvée. En fait, derrière les milliards de chiffre d’affaires des entreprises minières se cache une réalité tout autre. Des milliers de mineurs estiment travailler dans des conditions particulièrement difficiles en plus de se sentir exclus du partage d’une manne mal répartie. Et de nombreuses analyses leur donnent plutôt raison.
Pour Martin Hahn, spécialiste du secteur minier à l’Organisation internationale du travail (OIT), «davantage d’efforts pourraient être déployés pour mieux appliquer les réglementations minières existantes en particulier lorsqu’il s’agit de la sécurité et de la santé des mineurs», a-t-il affirmé après les affrontements malheureux de Marikana.
M. Hahn précise en outre que « les mineurs comme ceux de cette région – une zone où les opérations se déroulent à la fois à ciel ouvert et en sous-sol – sont souvent exposés à une multitude de dangers: éboulements, poussière, bruits intensifs, fumées et températures élevées, entre autres. De nombreux mineurs souffrent aussi de maladies comme la silicose et la tuberculose.
Pour ce qui est des rémunérations, les salaires sont souvent élevés pour les travailleurs hautement qualifiés comme les ingénieurs et les cadres, mais ils peuvent être très faibles pour les mineurs qui apprennent leur métier sur le tas et ont un niveau d’instruction formellement limité. »
Marikana est assise sur du platine et l’industrie sud-africaine de ce métal est la plus importante du monde. En 2011, elle a rapporté un revenu total de 13,3 milliards $US au pays et il pourrait augmenter de 15, 8% au cours des cinq prochaines années.
Lonmin, qui exploite la mine de Marikana, a enregistré des revenus de 1,9 milliard $US en 2011, en hausse de 25, 7% et dont la plus grande partie proviendrait des puits de Marikana. Paradoxalement, ou comme d’habitude diront certains, la majorité des profits de Lonmin passe dans les poches des actionnaires et les travailleurs de fond ne touchent en tout et pour tout que 480$US mensuels.
C’est une situation qui se retrouve malheureusement dans tous les champs d’exploitation minière en Afrique. Dans un marché où les actionnaires réclament un retour sur investissement rapide, les emplois sont généralement volatiles et les changements de site nombreux. D’où la précarité observée dans l’exploitation de métaux comme l’or.

Responsabilité sociale des multinationales
Il y a quelques années, la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) avait déjà porté l’attention sur la situation au Mali dans un rapport dévastateur qui titrait, « Troisième producteur d’or du monde, le Mali ne ramasse que des poussières ».
Paul Nsapu, Secrétaire général de la FIDH, déclarait à ce sujet : « L’exploitation de l’or est un secteur uniquement destiné à l’exportation qui crée peu d’emploi et n’irrigue pas l’ensemble de l’économie. En outre, les politiques de responsabilité sociale des entreprises multinationales présentes au Mali sont souvent insuffisantes voire inadaptées, et les entreprises ne respectent pas toujours la législation nationale en matière de droit du travail ». Isabelle Gourmelon, chargée de mission de la FIDH, explique simplement que « l’État, à la fois percepteur, actionnaire minoritaire, et régulateur public, est rongé par la corruption et n’a pas les moyens de contrôler les acteurs privés et de s’assurer que leurs activités contribuent à la réalisation des droits de l’Homme au Mali . On est peut-être loin des pires situations des tout premiers temps de l’exploitation minière, mais la main-d’oeuvre demeure corvéable à souhait.

A.Safaa

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