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Métaux critiques et stratégique

On en parle depuis plusieurs années déjà, les notions des métaux stratégiques et critiques restent, relativement, floues et il est difficile de les mettre sur le même plan, je partage ci-après quelques éléments clés.

Les métaux critiques sont les matières premières qui sont économiquement et stratégiquement importantes pour l’économie du pays, mais dont l’approvisionnement présente un risque élevé. Ils sont classés comme « critiques » car :
• ils ont une importance économique significative pour des secteurs clés de l’économie, tels que l’électronique, les technologies environnementales, l’automobile, l’aérospatiale, la défense, la santé et l’acier etc. ;
• ils présentent un risque d’approvisionnement élevé en raison de la très forte dépendance à l’égard des importations et du niveau élevé de concentration des matières premières critiques dans certains pays ;
• ils n’ont pas de substituts, en raison des propriétés uniques et fiables de ces métaux pour les applications actuelles et futures.

Les métaux stratégiques sont des ressources indispensables à la politique d’état ou bien à la défense nationale, le caractère stratégique provient des trois raisons suivantes :
• ils contribuent à la stabilité économique, car ils sont essentiels à la fabrication de nombreux produits industriels clés ;
• ils sont intégrés à la compétition technologique, car ils sont au cœur des ruptures technologiques et des produits les plus innovants ;
• ils sont un enjeu de la sécurité économique des États et des entreprises, car ils entrent dans la fabrication des armements et des technologies les plus sensibles du monde moderne (avions, satellites, outils de télécommunications, etc.).

Une matière première sera stratégique et/ou critique dans un pays mais pas nécessairement dans un autre et cela évolue dans le temps selon les applications techniques qui en sont faites. Ci-après quelques exemples des listes des métaux critique et/ou stratégiques de quelques pays :
• UE : https://lnkd.in/ecZ8Rtyv
• Canada : https://lnkd.in/enafd4sj
• USA : https://lnkd.in/ePGcRYsR
• Australie : https://lnkd.in/e9AmaB9x
• Afrique: nous n’avons pas encore et on doit y penser !

L’évaluation de la « criticité » est très relative. Dans une note du Programme des Nations unies pour l’environnement du 2018, les auteurs indiquent que « le point de départ de toute étude de criticité est de savoir de quel point de vue l’on cherche à se placer pour déterminer si une matière première peut s’avérer ou non critique. La criticité n’est ainsi ni universelle, ni intemporelle, ni binaire.

Évaluation de la criticité des matières premières, https://www.ademe.fr/

La notion de la criticité change selon la position de l’analyse qui peut se situer aux niveaux mondial, national ou régional et dépend de la nature de l’entité consommatrice de la matière première : économie nationale, industrie, entreprise ou technologie. Ainsi, l’importance stratégique de telle ou telle substance est perçue différemment selon les pays ou l’industrie selon son secteur de spécialité : par exemple, pour les constructeurs automobiles, le lithium et le cobalt nécessaires aux batteries des véhicules électriques, sont aujourd’hui devenus essentiels, tandis que le platine utilisé dans la fabrication des pots catalytiques des moteurs diesel, l’est moins.

Cependant, la criticité évolue aussi dans le temps et peut être sujette à de rapides variabilités au gré des bouleversements géopolitiques, réglementaires, sociétaux et techniques. Par exemple, si l’étain était d’une haute importance stratégique dans les années 1950, son intérêt a diminué avec la réduction de l’usage et/ou du poids des boîtes de conserve et des canettes de boisson, avant d’être à nouveau soutenu par la fabrication de nouveaux alliages dans lesquels il entre.

Dans une note de l’ADEME, en distinguant : les métaux « rares » ou peu abondants : leur clarke est comprise entre 1 et 1 000 ppm, c’est le cas du plomb, du cuivre, du zinc, du nickel et du cobalt ; les métaux « très rares » dont la concentration est inférieure à 1 ppm, comme les platinoïdes, les métaux précieux, l’antimoine, etc. ; les métaux « critiques » : relatifs à un épisode d’embargo ou de menaces de la part d’un pays producteur ; les métaux « stratégiques » : en lien avec la dépendance d’un État, d’un secteur ou d’une entreprise et enfin les « petits métaux » : qui se rapporte au volume produit et à la taille du marché.

Ces notions définitionnelles mettent en évidence la difficulté d’appréhender globalement l’ensemble des risques relatifs à la question des matières premières dans la transition énergétique : risque géopolitique (c’est le cas des terres rares, produites en Chine à 83 %), risque économique (embargo, manipulation de marché, etc.), risque lié à la production (sous-investissement) et risque environnemental ou social (émissions de polluants liés à la production, conséquences sanitaires, destruction de paysage, etc.).

Enfin, la criticité est donc un concept dynamique dans un monde en perpétuel changement où les évolutions géopolitiques, réglementaires, sociétales et technologiques sont fréquentes, elle nécessite une veille permanente en particulier pour les filières industrielles.

Youssef Daafi – EuroGeol-EFG, CPG-AIPG, QP-MMSA & RM-SME

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