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L’environnement à l’aune de la charte verte

ON NE PEUT épiloguer aujourd’hui sur la question environnementale sans évoquer le Conseil national de l’environnement (CNE). Depuis sa création en 1980 et sa restructuration en 1995, le CNE est présenté comme un forum de discussions et d’échanges sur l’environnement et le développement durable. Celui-ci ne s’est réuni que sept fois (1995, 1996, 2000, 2002 et 2007, 2009, 2011) durant toute son activité. Donc, quel bilan peut-on tirer de son existence? Il faut dire qu’il s’est perfectionné dans la multiplication des recommandations qu’il ne cesse d’en proposer sans les atténuer. Comme par exemple la mise en place d’une Haute commission de l’environnement et du développement durable et aussi d’un programme d’éducation environnementale. Autres propositions, c’est encore le renforcement des observatoires régionaux de l’environnement, auxquels s’ajoute la création d’une police de l’environnement et de tribunaux spécialisés. On s’est trop fixé sur la création de services supplémentaires, mais pour l’heure on continue à lorgner de manière triviale le devenir obscurcissant de l’écologie du pays.
De l’avis de certains experts dans le domaine, les discussions qui devaient en principe être centrées sur la charte et intégrées dans une future loi-cadre, continuent à déferler sur les mécanismes d’ordre opérationnel, dont on n’est pas là encore. Cette dernière ne peut activement se mettre en oeuvre que via un système efficace de protection durable de l’environnement (SPDE). Celui-ci se propose ainsi comme forme de suggestions un calendrier précis, pour les rendre concrètes et opérationnelles soit : 2015, 2020 et 2030. Une mise à niveau qui ne peut se réaliser sans le respect de l’échéancier 2015.
Pour lutter contre la détérioration de notre environnement et sa dégradation, qui coûte annuellement pour notre pays quelque 13 milliards de dirhams, soit 3,7% du Produit intérieur brut (PIB), un dispositif juridique est certainement nécessaire. En effet, il existe bien des lois de protection de l’environnement, mais celles-ci trouvent des difficultés à se traduire sur le terrain, faute d’arrêtés ou de décrets d’application. Concernant l’application de la loi, on constate qu’il n’est pas nécessaire de créer des tribunaux spécialisés dans l’environnement, mais seulement de recycler et former des juges dans le domaine. Et surtout éviter à l’État des charges supplémentaires de trésorerie qui ne pourraient être efficaces.
Autre condition pour réussir le SPDE, c’est le renforcement du contrôle. Mais pour le moment, les ressources humaines manquent et il n’existe qu’un très petit nombre d’inspecteurs assermentés, et qui ne peuvent intervenir efficacement. Sans parler de l’absence de coordination entre les différents départements ministériels dans ce domaine. Les mécanismes de contrôle ne sont pas encore définis. La loi cadre sur l’environnement stipule le principe pollueur-payeur, qui est repris dans le projet de la charte sous forme d’obligations et de devoirs, mais le mécanisme de son application ne peut se réaliser dans la réalité. C’est une expérience certes française qui ne peut s’accommoder avec la réalité marocaine. Autre frein qui peut entraver la mise en oeuvre de la charte est le manque de synergies entre les différents programmes nationaux: (Plan Azur, Maroc Vert, Halieutis pour la pêche maritime, Plan solaire, Programme national d’assainissement liquide, Programme national de gestion des déchets ménagers et assimilés, etc.). Un tas de programmes, tambour faisant, ne répondant à aucun critère de développement intégré et alourdissent par leur enchevêtrement la cadence d’opérationnalité. Lorsque ces projets seront mis en oeuvre, il faut penser aux structures permanentes chargées de leur évaluation. Est-ce le secrétariat d’État à l’Environnement ou le Conseil national de l’environnement (CNE) ? Qui en a efficacement la charge de veille ? Si ce rôle revient en fait au CNE, on est en droit de se poser la question sur sa véritable fonction dans cette dynamique; puisqu’il se réunit de manière irrégulière. Comme il est question aussi de s’interroger sur la charte «verte» dans le cadre de la régionalisation et son application, l’hétérogénéité à ce stade fait défaut. On ne peut donc pas se soustraire à la seule administration publique et laisser le devoir de la société civile à côté. C’est le devoir des opérateurs économiques qui compte en premier lieu.

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