InterviewReportage

Interview avec M. Hamid Benazouz, DG de l’ONSSA

La salubrité alimentaire est notre devoir

Le contrôle des produits alimentaires destinés à la consommation passe pratiquement par la mise en équation d’un service chargé d’assurer la sécurité sanitaire des aliments. Il se concrétise par son action dans le circuit et les échanges commerciaux y compris les produits de la pêche. C’est donc par l’autorité de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), relevant du ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime, que la compétitivité des produits agricoles et maritimes rentre en jeu.
Considérant sa mission dans la protection du consommateur, nous avons estimé prendre acte avec son directeur général M. Hamid Benazouz.

Énergie et Mines: Qu’elles sont au juste les prérogatives de cet établissement ?
L’ONSSA comme vous l’avez précisé est un établissement public doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière.
Il est placé sous la tutelle du ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime et exerce, pour le compte de l’État, les attributions relatives à la protection de la santé du consommateur et à la préservation de la santé des animaux et des végétaux.
A cet effet, l’Office exerce conformément à la législation et à la réglementation en vigueur les missions suivantes : assurer la surveillance et la protection sanitaire du patrimoine végétal et animal au niveau national et aux frontières, assurer la sécurité sanitaire des produits alimentaires depuis les matières premières jusqu’au consommateur final, y compris les produits de la pêche et les aliments pour animaux, homologuer et contrôler les intrants agricoles (semences, pesticides, engrais) et les médicaments vétérinaires et appliquer les législations et réglementations relatives à la police sanitaire vétérinaire et phytosanitaire.
Créé suite à une restructuration du département de l’Agriculture, l’ONSSA se veut un dispositif institutionnel qui vise à asseoir un système efficace et efficient de contrôle des produits alimentaires dans notre pays.
Sa création est venue pour concrétiser une des orientations stratégiques du Plan «Maroc Vert», visant l’amélioration de la productivité et de la compétitivité des produits agricoles et agroalimentaires. Par ailleurs, l’ONSSA est l’autorité nationale chargée de négociations en matière sanitaire et phytosanitaire pour faciliter les échanges commerciaux des animaux, végétaux, produits animaux et végétaux et aliments pour animaux et des relations techniques avec les organisations internationales spécialisées : l’Organisation mondiale de la santé, Le Codex Alimentarius, la convention internationale de la santé végétale. A cet effet, les missions dévolues aux anciennes directions (Direction de l’élevage-Services-vétérinaires et Direction de la protection des végétaux des contrôles techniques et de la répression des fraudes) en matière sanitaire et phytosanitaire qui sont transférées à l’ONSSA.

La direction régionale de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) a récemment organisé à Casablanca un séminaire pour information et sensibilisation placé sous le thème «La sécurité sanitaire des produits alimentaires : responsabilité de tous». Et également à Oujda, une rencontre similaire portant sur «La sécurité sanitaire des produits alimentaires, une responsabilité de tous». Et respectivement à Tanger sur «La sécurité sanitaire des produits alimentaires : les principes, les droits et les obligations». Est-ce là une campagne de vulgariser les différentes tâches que compte entreprendre l’ONSSA, ou tout simplement une sortie scientifique d’information générale?
Effectivement, nous avons organisé un séminaire national et 17 séminaires régionaux sur le thème «La sécurité sanitaire des produits alimentaires : une responsabilité de tous» : loi n° 28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires: principes; droits et obligations et ce durant les mois de juin et juillet 2010. Ces rencontres avaient pour objectif de présenter les missions de l’ONSSA et d’informer les opérateurs économiques, les structures administratives concernées et les associations de consommateurs sur les nouvelles dispositions introduites par la loi 28.07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires et les modalités de son application.
L’ONSSA a pour charge la garantie, la salubrité et la sécurité sanitaire des produits animaux ou d’origine animale et des aliments pour animaux.

Quelles sont les mesures soufflées par les pouvoirs publics à l’initiation de votre programme?
Les mesures prises par les pouvoirs publics en faveur de notre programme concernent les ressources financières, les moyens humains et le volet réglementaire.
D’abord, une enveloppe budgétaire de l’ordre de 598 millions de dirhams nous a été allouée pour l’exercice 2010 dont 294 sont réservés au budget de fonctionnement alors que les 298 millions restants sont alloués au budget d’investissement. Ce budget est réservé à la réalisation des programmes suivants: le domaine de services vétérinaires, le domaine des contrôles et de la protection des végétaux, la mise à niveau des laboratoires, le soutien des missions et mise à niveau des services. Ensuite, un capital humain de 2243 employés dont 293 médecins vétérinaires, 289 ingénieurs, 53 administrateurs et assimilés 927 agents de maitrise et 658 agents d’appui, a été attribué à notre Office.
Enfin, il y a eu la promulgation de la loi n°28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires qui est venue consolider l’arsenal juridique relatif au contrôle des produits alimentaires. Cette loi cadre qui institue les principes et concepts de base de la sécurité sanitaire des produits alimentaires, tels que la responsabilisation des producteurs et industriels, l’obligation d’agrément sanitaire des industries alimentaires, l’enregistrement des élevages, l’identification du cheptel, la traçabilité, l’auto-contrôle, les guides de bonnes pratiques d’hygiène et le rappel des produits
non conformes.
Ces dispositions couvrent toutes les étapes de la production, manipulation, traitement, transformation, conditionnement, emballage, transport, entreposage, distribution, mise en vente ou exportation de ces produits.

Et quels sont les moyens de coercition mis à la disposition de votre département pour contrecarrer les abus de personnes physiques transgressant la loi?
Conformément à la réglementation en vigueur et notamment la loi 28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires, les agents habilités, relevant de l’ONSSA sont chargés de la recherche et de la constatation des infractions aux dispositions de la loi 28-07 et des textes pris pour son application.
Les agents habilités de l’ONSSA procèdent aux investigations d’usage pour s’assurer de la salubrité des aliments et leur conformité. A l’issue de ces investigations, ils prennent les dispositions qui s’imposent conformément à la réglementation en vigueur. Ils procèdent à la saisie de produits reconnus dangereux ou non conformes.
Dans le cas de constatation d’infractions, des procès verbaux sont dressés, instruits et transmis à la justice De même, les dispositions de la loi prévoient l’octroi d’autorisation ou d’agrément sanitaire pour les établissements et les entreprises du secteur alimentaire qui répondent aux normes sanitaires requises. Une fois ces établissements et entreprises ne peuvent assurer la production d’aliments sains, l’ONSSA procède à la suspension de l’autorisation ou de l’agrément de l’entreprise ou de l’établissement concerné jusqu’à sa mise à niveau, le cas échéant, il procède au retrait de son autorisation ou agrément.

Un communiqué relevant du département de la Pêche maritime met en garde le public des résultats obtenus dernièrement par l’Institut national de recherche halieutique (INRH), dans la zone conchyllcole de Sidi R’bat, relevant de la région d’Agadir, et à Essaouira dans la zone Chouik Oum Toyor, divulguant que les coquillages dans ces régions dénotent la présence de biotoxines marines. D’après vous, où se situe le mal et qu’elles sont les préconisations à entreprendre pour mieux contenir la consommation de ces coquillages portant danger pour la santé des consommateurs?
Et quelles sont les mesures entreprises par les autorités publiques ?

La salubrité et la qualité des coquillages sont liées d’une part au milieu marin dans lequel ils sont produits et/ou élevés, et d’autre part aux conditions d’hygiène, de manipulation, d’entreposage et de transports de ces produits depuis la récolte jusqu’à la consommation.
La surveillance du milieu marin est assurée par l’Institut national de recherche halieutique (INRH) et le contrôle de la salubrité des coquillages est assuré par les services vétérinaires de l’ONSSA depuis la production jusqu’à la consommation.
L’INRH entreprend les études portant sur les paramètres microbiologiques, chimiques et phytoplanctoniques (sources de biotoxines) et seules les zones classées salubres sont ouvertes à l’exploitation.
Après son classement, la zone de production fait l’objet d’une surveillance sanitaire régulière destinée à vérifier la pérennité des caractéristiques ayant permis son classement et dépister d’éventuels épisodes de contamination.
Le contrôle de la salubrité des coquillages est soldé par la délivrance d’un certificat sanitaire vétérinaire attestant la salubrité des coquillages pour la consommation humaine. Seuls les produits conditionnés et portant une étiquète de salubrité sont autorisés à la commercialisation.
Lorsque les résultats de la surveillance sanitaire révèlent une contamination, il est procédé à la fermeture de la zone contaminée et à la publication d’un communiqué de presse qui informe le public de la fermeture de la zone et l’interdiction de la récolte et de la commercialisation de tous les coquillages bivalves issus de la zone contaminée, et ce jusqu’à l’épuration totale du milieu marin de la zone. Ledit communiqué recommande aux consommateurs de ne s’approvisionner qu’en produits conditionnés, portant les étiquettes sanitaires d’identification et commercialisés dans les points de vente autorisés (marchés officiels) et avertit le consommateur du danger sur la santé humaine de la consommation des coquillages colportés ou vendus en vrac.
Raison pour laquelle l’ONSSA diffuse sur son site web, toute alerte concernant l’exploitation et la consommation des coquillages provenant de la zone contaminée.

La plupart des industriels exportateurs des produits de la mer préconisent l’allégement des procédures, et l’automatisation des circuits administratifs, pour mieux atteindre les marchés extérieurs et être plus compétitifs. Comment l’ONSSA pourra répondre à ces attentes ?
Les actions menées par l’ONSSA pour répondre à ces attentes ont consisté en la mise en place des mesures suivantes: l’émission du certificat sanitaire vétérinaire à l’export, à partir de mars 2008 par les services vétérinaires des lieux d’origine du produit. Ceci a permis de simplifier pour les exportateurs les démarches d’obtention du certificat puisqu’auparavant ce certificat sanitaire était délivré par les services vétérinaires des directions du contrôle et de la qualité aux postes frontières, en se basant sur le certificat sanitaire d’origine délivré par le service vétérinaire du lieu d’origine du produit, l’allégement du système de certification au profit des produits fabriqués dans des établissements disposant de système d’auto-contrôle basé sur les principes HACCP et jugé efficace par les services vétérinaires. Comme ces établissements assurent eux-mêmes les prélèvements des échantillons et réalisent les analyses au sein de leurs laboratoires internes, le contrôle vétérinaire se base donc sur ces résultats des auto-contrôles pour la délivrance des certificats sanitaires.
Ainsi, les industriels qui mettent en place des systèmes d’auto-contrôle performants se voient réduire considérablement les délais entre la production du produit et son exportation en évitant les délais d’attente et d’obtention des résultats des laboratoires externes, la mise à la disposition des opérateurs d’une permanence des services vétérinaires hors des horaires de travail et pendant les week-ends et jours fériés, et ce pour la certification des produits destinés à l’exportation et à l’importation, l’adoption par nos services vétérinaires du système de certification électronique des pays de l’Union européenne. Ce système permet le suivi des produits certifiés lors de leur cheminement vers le poste d’entrer dans le pays de l’Union européenne. Ceci permet la préparation du contrôle des produits concernés à destination et permet également de régler les anomalies qui peuvent bloquer ou refouler les produits, et l’entrée en vigueur de plans de contrôle par catégorie de produits. Ces plans de contrôle vont permettre à partir l’année 2011 de passer d’un contrôle produits à un contrôle du process de production. Ceci va permettre la responsabilisation des professionnels pour la production et la mise sur le marché de produits sains et salubres.

Un dernier mot M. le Directeur.
Pour terminer, je voudrais juste rappeler que la question de la sécurité sanitaire des aliments est une question qui ne concerne pas seulement les pouvoirs publics mais aussi les professionnels et les consommateurs.
Nous avons dès le démarrage de nos activités été conscients de l’implication de tous ces acteurs dans la mise à niveau de notre système national de sécurité sanitaire et nous en avons fait des partenaires privilégiés.
Le secteur de la pêche et de la transformation des produits de la pêche au Maroc est l’un des secteurs où les professionnels ont enregistré des avancées remarquables pour mettre leurs unités au diapason des normes nationales et internationales en matière de sécurité sanitaire.

Propos recueillis
par Énergie et Mines

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